O Adonaï, ô conducteur d’Israël

Classé dans : Prières et Méditations | 0

O Adonaï, ô conducteur d’Israël, toi qui guidas Joseph comme le berger sa brebis, ô Emmanuel, ô Sapience, je me donne à toi. Je te fais totalement confiance. Tu es plus sage que moi, tu as plus d’amour pour moi que je n’en ai moi-même. Daigne à travers moi accomplir tes desseins, quels qu’ils soient. Je suis né pour te servir, être à toi, être ton instrument. Laisse-moi être ton instrument aveugle. Je ne demande pas à voir. Je ne demande pas à connaître. Je demande simplement à servir.

(3)

1. Quel cerveau humain peut imaginer l’amour que le Père éternel porte à son Fils unique ? C’est un amour qui a toujours existé et qui est infini. Il est si grand que les théologiens ont donné au Saint-Esprit le nom de cet amour, comme pour exprimer son infinité et sa perfection. Cepen­dant, réfléchis, mon âme, et incline-toi devant cet auguste mystère, à savoir que de même que le Père aime le Fils, de même le Fils t’aime, si tu es l’un de ses élus ; car il a dit expressément : « De même que le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour. » Est-il dans tout le cercle des vérités révélées plus grand mystère que celui-ci ?

2. L’amour que le Fils te porte, à toi, créature, est ana­logue à celui que le Père porte au Fils incréé. O mystère merveilleux ! Telle est l’explication de cette histoire étrange : le Fils a pris ma chair et il est mort pour moi. Le premier mystère annonce le second, qui accomplit le premier. S’il ne m’avait pas aimé aussi inexprimablement, il n’aurait pas souffert pour moi. Je comprends maintenant que s’il est mort pour moi, c’est qu’il m’aimait comme un père aime son fils – non pas simplement comme un père humain, mais comme le Père éternel aime le Fils éternel. Je comprends désormais la signification de cette humiliation qui serait autrement inexplicable : il a préféré me reconquérir plutôt que de créer de nouveaux mondes.

3. Comme il est constant dans son affection ! Il nous a aimés depuis les jours d’Adam. Il a dit dès le commen­cement : « Je ne te laisserai ni ne t’abandonnerai. » Il ne nous a pas abandonnés dans notre péché. Il ne m’a pas abandonné. Il m’a retrouvé et m’a reconquis. II a fait de moi son affaire. Il a résolu, malgré moi, de me restaurer dans cet état de béatitude auquel je m’étais si obstinément opposé. Et maintenant que me demande-t-il, lui qui m’a aimé d’un amour éternel, si ce n’est de l’aimer dans la mesure de mes faibles moyens ?

O mystère des mystères, que l’ineffable amour du Père pour le Fils soit comparable à l’amour du Fils pour nous ! Comment cela a-t-il été possible, Seigneur ? Qu’as-tu vu de bon en moi qui suis un pécheur ? Pourquoi t’es-tu attaché à moi ? « Qu’est-ce que l’homme pour que tu t’intéresses à lui, et qu’est-ce que le fils de l’homme pour que tu le visites ? » Cette pauvre chair qui me recouvre, cette âme faible et pécheresse, qui n’a de vie que si ta grâce la vivifie, tu as voulu les aimer. Achève ton œuvre, Seigneur, et de même que tu m’as aimé dès le commencement, fais en sorte que je finisse par t’aimer.

(John Henry Newman, Méditations sur la Doctrine Chrétienne, Ad Solem 2000, p. 29-31.)