La valeur inestimable d’un bon professeur

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Seán McLaughlin

Si nous nous devions nous interroger sur les personnes qui, dans notre vie, ont d’une façon ou d’une autre influencé nos opinions et les décisions que nous avons prises, beaucoup d’entre nous pourraient en faire une liste considérable. Il y a eu évidemment des membres de notre famille qui ont nourri notre foi, des amis avec qui nous avons partagé des centres d’intérêt, et peut-être des figures de l’histoire qui nous ont fortement impressionnés. Et pourtant je suis sûr que les personnes qui ont exercé l’influence la plus profonde sur le développement de nos convictions ont été nos professeurs. Même s’ils ne remplacent pas le rôle éducatif primordial des parents, les professeurs nous semblent être, au moment de l’adolescence, ces personnes objectives, hors du cercle familial, qui nourrissent l’esprit dans la réflexion, la décision et l’action. En un mot, un  bon professeur a une valeur inestimable.

L’évolution religieuse du jeune Newman est dominée par l’influence qu’exerça sur lui son maître d’école évangélique Walter Mayers. Newman l’a décrit comme « le moyen humain  par lequel est née en moi la foi divine» et comme quelqu’un « auquel je dois beaucoup. » Le style de foi de Mayers n’était pas foncièrement différent de celui de Newman. Né à Gloucester en 1790, il excella dans les lettres classiques et s’inscrivit à Oxford en 1808. Vers la fin de ses études, Mayers vécut une conversion spirituelle qui le conduisit vers les ordres anglicans. En 1814, ayant vu la mort de près,  il s’orienta vers le courant évangélique. Cette seconde conversion eut pour effet ce que ses mémoires décrivent comme « une influence solennelle et bénéfique sur son esprit », et lui apporta « une vision plus proche de l’éternité ».

Sa conversion au courant évangélique coïncida avec sa nomination  à la chaire de Lettres Classiques à la Grand Ealing School en 1814. Pendant ses années d’exercice à Ealing, il eut l’occasion de converser fréquemment avec le jeune Newman qui y avait été envoyé comme pensionnaire en 1808. Mayers était un professeur particulièrement doué qui manifestait un  sens profond de « la responsabilité qui lui incombait dans l’attention portée aux élèves ; il veillait à leur bien-être spirituel de la façon la plus vigilante et la plus affectueuse. » Newman évoque en ces termes l’effet bénéfique de l’accompagnement pastoral de Mayers :

« [il m’a permis] de traverser l’époque dangereuse de mes années d’étudiant dans cette école sans que ma conscience ne soit blessée par quelque péché grossier ou scandaleux […] les efforts qu’il a déployés pour m’être utile, la sincérité avec laquelle il semblait prier pour moi et la promptitude qu’il a toujours manifestée pour me conseiller dans mes objectifs. »

Dans l’Apologia, Newman rappelle comment les « conversations et sermons » de Mayers, ainsi que « les livres qu’il me mit entre les mains » eurent pour effet sa première conversion à l’âge de quinze ans. Les Lettres et journaux de Newman témoignent d’une abondante correspondance entre les deux hommes, et montrent comment Newman s’est tourné vers Mayers pour lui demander conseil sur un certain nombre de questions théologiques importantes qui lui faisaient problème. En outre, Mayers lui a fait connaître des auteurs qui ont façonné ses premières convictions sur des questions de doctrine. Même si plus tard Newman devait développer les convictions qu’il avait reprises de son ancien maître et éventuellement en abandonner certaines, il se sentait redevable à son égard de son souci pour sa formation humaine et la recherche de la vérité qui allait au-delà d’une simple activité intellectuelle. Je suis sûr que ce fut l’exemple de cet éducateur si doué qui a enraciné en Newman la vision d’une éducation complète basée sur le principe d’échanges mutuels entre professeur et étudiant.

Trad. Mme Sylvie Roura

Avec la permission de « The Portal on-line Magazine Juillet 2012 www.portalmag.co.uk«